« Madagascar sera beaucoup plus « éclairé »
avec le projet Volobe amont à partir de 2028 ».
Entretien réalisé par : Youcef MAALLEMI (maallemi-youcef@lecourrierdafrique54.com)
Le Courrier d’Afrique 54 :
En votre qualité de Directeur général, Comment présentez-nous la Compagnie
Générale d'Hydroélectricité (CGHV) ?
Rémy HUBER : La compagnie générale d’hyrohelectricité de Volobe amont est une société de droit malagasy créée en 2016 suite à l’appel d’offre fait par l’Etat malagasy ayant pour mission d’assurer le développement , la construction et l’exploitation du projet d’aménagement hydroéléctrique du site de Volobe amont. Un des projets prioritaires définis dans le Plan de Développement en Moindre Coût (PDMC). Elle est constituée par des partenaires financiers nationaux et internationaux de références et développée sous forme de partenariat public -privé avec un coût d’investissement environ 550 millions d’euros.
Comment se porte le secteur d’électricité au Madagascar ?
En dépit des potentiels de la grande île en énergie hydroélectrique et autres sources d’énergie, le secteur est dans la difficulté. Cette difficulté concerne à la fois la production et la distribution dont les investissements ont été insuffisant sur les 30 dernières années. Environ 70-75% de la production viennent du fuel lourd et ne couvrent qu’environ 20% de la population. Madagascar est parmi les pays ayant un faible taux d’accès en énergie avec des coûts les plus chers. Plusieurs projets d’amélioration ont été identifiés et mis en œuvre par l’Etat en partenariat avec les différents acteurs dont la Banque mondiale et les investisseurs afin de doubler cet accès et d’en réduire le coût. C’est un objectif atteignable avec une bonne synergie d’actions et bien échelonnée. Il y a déjà les projets répondant aux solutions à court et moyen terme comme le développement des parcs solaires et les projets visant les solutions sur le long terme comme les hydro dont Volobe amont. Le bon avancement de toutes ces actions vont permettre de réaliser un grand bond en avant au profit du social, de l’économie et l’environnement.
Parlez-nous de l’accord
conclu entre l'Etat Malagasy et votre Compagnie Générale d'Hydroélectricité (CGHV).
Le 26 mai dernier,
CGHV a conclu un accord avec l’Etat malagasy après quelques années de travail
et de discussion. C’est un accord équilibré, basé à la fois sur les intérêts
communs de la population malagasy, de l’état et sur la viabilité du projet :
• 25 ans de concession permettant au
consortium d’amortir l’investissement et de céder à l’issue de cette période,
l'infrastructure à l'Etat si celui-ci le demande ;
• Participation de l'Autorité Publique
dans l'actionnariat de la CGHV jusqu'à 20%
• Atteinte de l'objectif de l'État de
réduire le prix de l'électricité jusqu'à quatre fois moins cher que le prix moyen
actuel de la production ;
• Engagement de la CGHV à développer des
partenariats avec des fournisseurs locaux et nationaux dans le respect des
réglementations relatives à l'approvisionnement pendant la phase de
construction ;
• Engagement de la CGHV, à travers son
programme RSE, à produire de l'électricité pour le réseau local de la JIRAMA
une fois la centrale en service, aux communautés riveraines de la centrale de
Volobe amont pour bénéficiaires.
Est-ce que ce projet (Volobe) va réduire le coût d’électricité ?
La production en fuel coûte cher au portefeuille de la société d’Etat en charge de la production électrique et de l’eau (JIRAMA). Les raisons d’être du projet vont bien sûr au-delà de l’augmentation de la production d’électricité en permettant la réduction du coût de l’électricité livrée à la JIRAMA. C’est une perspective que les deux parties souhaitent atteindre au moment de la livraison du premier kilowatt heure vers 2028. Tous les préalables et conditions y afférente sontétudiés ensemble avec l’Etat malagasy. C’est un défi que nous devons relever ensemble dans le respect des différents engagements.
Concrètement, comment votre entreprise contribue-t-elle à remédier ce problème d’électricité au Madagascar?
Le projet Volobe amont va produire en
moyen 750GWh/an soit 40% de la consommation nationale annuelle avec une
puissance installée de 120 MW soit 25% de l’objectif de l’Etat. Il permettra d’électrifier
environ deux millions de personnes en plus ou environ trois cents soixante
mille ménages sans parler la création d’emplois direct ou indirect. Un apport
significatif contribuant largement à la bonne avancée vers une transition
énergétique. Il va alimenter la ville du grand port va être raccordé la
capitale via le projet PRIRTEM I (Projet de Renforcement et d’Interconnexion
des Réseaux de Transport d’Energie Electrique à Madagascar). La concrétisation
de l’industrialisation en dépend beaucoup de ce projet notamment la région Est
où tous les atouts comme le port, lesressources sont déjà sur place. Ce qui y
manque est les projets structurants pour la route et l’énergie électrique.
Le projet Volobe est considéré comme le plus grand vecteur de croissance de l’économie nationale, quel est le délai de réalisation et quelle est sa capacité de production?
La signature est une étape essentielle nous permettant d’avancer
vers la concrétisation du Projet. Nous avons à peu près 2 ans pour finaliser
les principales actions suivantes :
• Renforcement de
l’équipe sur le terrain et la présence à Toamasina et à Volobe (Bureaux).
• Réactualisation des
données socio-économiques et environnementales.
• Processus pour la
sécurisation foncière avec l’appui technique de l’Etat.
• Développement d’un
plan de développement et plan de réinstallation.
• Développement des
PGES qui sont la déclinaison du PGE.
• Demande et obtention
des différentes autorisations et permis relatifs aux différents travaux à
réaliser.
• Appels d’offres et
finalisation des contrats de travaux (infrastructures principales et annexes).
• Discussions avec les
prêteurs, finalisation du tour de table et établissement des contrats de
financement.
L’essor du continent africain dépend en grande partie de sa problématique énergétique, comment, selon vous, le Madagascar peut-il relever ce défi ?
Madagascar à tous les potentiels, il nous reste la mise en place d’une bonne
synergie d’actions avec des jalons précis alignés aux moyens et enjeux. Le
besoin en énergie dépend de la consommation et des ressources. Sur le plan démographique, Madagascar n’a pas besoin de mettre en
ouvre tous les projets au même moment car les moyens financiers et techniques
sont encore très limités. Toutefois la réalisation des projets selon les plannings prévus sera une meilleure solution permettant de relever le défi dans le meilleur délai et dans des
conditions économiquement rentables et socialement viables.
Pour terminer, comment, selon vous éclairai le Madagascar en 2030 ?
Madagascar sera beaucoup plus « éclairé » avec le projet Volobe amont à partir de 2028. La particularité du projet Volobe amont est sa mission multidimensionnelle : sociale, économique et écologique. 2030 est très proche, la concrétisation des projets en court n’est plus une option face à l’urgence énergétique, je suis confiant que avec tous ses potentiels et l’engagement de tous les acteurs, Madagascar pourra renverser la situation dans laquelle elle se trouve actuellement.
Futur barrage Volobe amont.
Parcours
professionnel de M. Rémy HUBER
Ingénieur de l'Ecole Nationale
Supérieure d'Hydraulique et de Mécanique de Grenoble. Près de 30 ans
d'expérience dans les aménagements hydroélectriques et hydrauliques. De 1991 à
1995, il a consacré l'essentiel de son temps dans les services études et
travaux des unités d'exploitations hydrauliques d'EDF, l'amenant à réaliser des
projets complets (études et suivi des travaux de réhabilitation des
installations - barrage, galerie, conduites forcées - du parc hydroélectrique
EDF existant). En 1995, Rémy Huber intègre le Centre d'Ingénierie Hydraulique
d'Electricité de France, au sein duquel il occupe les fonctions de Chef
d'Aménagement de l'Allongement de l'Ecluse de Kembs puis de Chef de projet
d'affaires internes et externes à EDF, en pilotant les projets en liens avec le
glissement de la Clapière (conception et travaux de la galerie hydraulique),
les évacuateurs de crues sur les barrages de Castillon, de La Chaudanne, de
Motz et enfin Ingénieur Principal chargé de la passation des marchés du barrage
de Rizzanese (54 MW) en Corse. Rémy Huber a travaillé ensuite sur des projets
internationaux tels que pour le Gabon en tant que Chef de projet responsable
des études de faisabilité ou le Brésil – projet hydroélectrique d’Itaocara
(145MW) en tant que chef du lot Génie Civil et mise au point des Contrats,
ainsi que pour des études de faisabilités de suréquipement pour l’Ile de la
Réunion. Rémy Huber a travaillé ensuite sur des projets internationaux tels que
pour le Gabon en tant que Chef de projet responsable des études de faisabilité
ou le Brésil en tant que chef du lot Génie Civil, ainsi que pour des études de
faisabilités de suréquipement pour l’Ile de la Réunion. De 2002 à 2005, il a
intégré l’Unité de Production Méditerranée, Groupe d’Exploitation Hydraulique
Var – Roya comme Directeur Adjoint, Chef du Pôle Maintenance en charge de la
maintenance et l’exploitation de 23 centrales hydroélectriques de
l’arrière-pays niçois. En 2005, il rejoint le projet hydroélectrique de
construction de Nam Theun 2 au Laos (1100MW) comme Package Manager en charge de
toute la partie aval du projet (barrage de démodulation, canal de 30 km,
galerie, seuil d’oxygénation, résidence de l’exploitant) et de la formation du
futur exploitant. De fin 2007 à mi 2012, il est le Chef du Centre Régional
d’Auscultation de Grenoble en charge de l’auscultation des ouvrages Génie Civil
(près de 400 barrages) du parc hydraulique d’EDF ainsi que de clients externes
(Gabon, ; Argentine, Chili, Laos). À partir de mi 2012, il rejoint la Direction
de la Division Production Ingénierie Hydraulique (DPIH) comme Pilote
Stratégique du Projet SuPerHydro, le plus important programme de maintenance
lourde des installations hydrauliques d’EDF de ces 20 dernières années avec 500
opérations pour un budget de plus de 1 Milliard d’Euros. Il représente
notamment la Direction dans les organismes de pilotage des projets (Comité de
Pilotage, Directoire). Il a également en charge le déploiement du référentiel
de pilotage des projets au sein de la Division. Il a été de permanence auprès
de la Présidence du groupe EDF. Il est à la fois en posture de veille active
sur l’ensemble des événements de toutes natures mais aussi secrétaire général
des cellules de crise en cas de déclenchement d’une crise impactant le Groupe
EDF. Il est à la
fois en posture de veille active sur l’ensemble des événements de toutes
natures.
Depuis novembre 2017, Rémy HUBER pilote activement avec le soutien des
partenaires du projet le développement du projet Volobe pour l’amener dans sa
phase de construction puis d’exploitation.