Dépasser
les tensions pour un climat apaisé et un dialogue productif tenant compte des
nouvelles mutations géostratégiques mondiales s’orientant vers un monde
multipolaire.
Chaque pays défendant se ses intérêts propres,
l’Algérie et la France ont traversé une période de crise
où l’ambassadeur d’Algérie a été rappelé pour consultation le 08 février
2023 et suite à l’entretien entre les
présidents Abdelmadjid Tebboune et Emmanuel Macron le 24 mars 2023
l’ambassadeur d’Algérie a repris ses fonctions le 29 mars 2023. Contrairement à certains esprits mal intentionnés qui ne veulent
pas d’une relation apaisée, dont l’extrême droite et les
nostalgiques de l’Algérie française , supputant même une
annulation, pour différents prétextes fallacieux, comme je l’annonçais dans
plusieurs médias nationaux et internationaux ,le 19 avril 2023 , au
lendemain du report , suite à nos informations, la visite du
président de la république, confirmée officiellement le 23 avril 2023,
s’effectuera en France la deuxième moitié du mois de
juin 2023.
Par : Abderrahmane MEBTOUL : Professeur des universités, expert international.
1.-Lors de la dernière
visite du président français en Algérie fin août 2022, suivi de la visite de la
Première ministre française accompagnée de 16 ministres, les 09 et
10 octobre 2022, les deux président, algérien
et français ont signé le 27 août 2022 à Alger, une déclaration
commune pour un partenariat renouvelé, concret et ambitieux dans divers
domaines.
L’Algérie et la France ont décidé la création d’un Haut
Conseil, chargé de suivre les relations et leur évolution, une réunion des
premiers ministres et de membres des deux gouvernements périodiquement ainsi
que des visites bilatérales pour fixer l’agenda de coopération entre les deux
pays. La Déclaration d’Alger a pour but de concilier à la fois le devoir
de mémoire et préparer l’avenir, surtout en ce monde incertain et turbulent qui
devrait connaître un profond bouleversement géostratégique d’ici à 2030. Depuis
des années, l’épanouissement de la relation stratégique approfondie entre
l’Algérie et la France est systématiquement entravé, pour des raisons obscures,
par de puissants lobbies ne voulant pas d’une relation apaisée entre l’Algérie
et la France. Dans ce cadre, le facteur culturel se fondant sur la tolérance et
le respect d’autrui est important pour aplanir les divergences. C’est que l’ère
des confrontations n’a eu cours que parce que les extrémismes ont prévalu dans
un environnement fait de suspicion et d’exclusion. Connaître l’autre, c’est
aller vers lui, c’est le comprendre, mieux le connaître et non lui imposer un
schéma social contraire à ses valeurs. Dans ce cadre, le devoir de mémoire
est important pour l’Algérie afin de préparer l’avenir, loin de tout esprit de
domination. Aussi, l’installation de la commission annoncée de chercheurs
algériens et français sur toute la colonisation et la Guerre d’Algérie est
importante pour le devoir de vérité.
2.- Concernant le
volet stratégique et la stabilité de la région du Sahel, face aux tensions
géostratégiques dans le monde, chaque pays a des positions
spécifiques notamment sur le conflit en Ukraine, en Asie, au Moyen
Orient, le Sahara occidental et les tensions au Mali et en Libye.
Dans plusieurs rapports
entre 2018 et 2022, les autorités tant américaines qu’ européennes, russes et
chinoises, ont tenu à souligner qu’avec les tensions observées dans la région,
l’Algérie contribue à la stabilisation de son voisinage immédiat. L’instabilité
de la région a un effet négatif sur toute l’Europe et renvoie d’ailleurs à
l’urgence d’une nouvelle architecture des relations internationales fondée sur
le co-développement. Le chef d’état-major algérien a tenu à rappeler
avec les responsables français la question de la sécurité en Méditerranée et la
région du Sahel , sans esprit de domination, et que la coopération
avec la France concerne également la réhabilitation des deux anciens
sites d’essais nucléaires français, à Reggane et In Ikker, et la restitution
des cartes topographiques permettant la localisation des zones d’enfouissement,
non découvertes à ce jour, des déchets contaminés, radioactifs ou chimiques,.
L’Algérie entretient, dans le cadre du respect mutuel, d’excellentes relations
avec les USA, la majorité des pays européens, comme en témoigne la récente
visite de la Première ministre de l’Italie, de la Grande-Bretagne en Algérie le
haut conseiller de la Défense pour la région MENA, du ministère de la Défense
britannique, la Chine et la Russie pour ne parler que de certains acteurs.
Comme viennent de le souligner la Première ministre de l’Italie et la
Secrétaire d’Etat adjointe américaine en charge des organisations
internationales, Michele Sison, lors de leurs visites à Alger, l’Algérie est un
pays leader dans le règlement des conflits au niveau régional. Comme je l’ai fortement souligné lors du sommet de la société
civile, lors de ma conférence sur la coopération
euro-méditerranéenne et euro-africaine, tenu à Marseille le 24 juin 2019 –
ayant présidé la délégation algérienne, en tant que président de la
commission transition énergétique des 5+5+Allemagne, en présence du
président français Emmanuel Macron , les ministres des Affaires
étrangères, dont l’Algérie, le FMI, la Banque mondiale et les représentants de
la Commission européenne –, il s’agit de préparer – l’avenir par le respect
mutuel afin de contribuer – ensemble – à la stabilité régionale et au
co-développement grâce au dialogue des cultures et la tolérance – source
d’enrichissement mutuel.
3.-Dans le domaine
économique, L’attractivité du marché algérien
découle des avantages comparatifs suivants :
la proximité géographique des marchés potentiels
d’Europe, d’Afrique et du Moyen-Orient ; la taille du marché intérieur
étant estimée à plus de 45 millions de consommateurs ; des richesses
naturelles importantes ; des ressources humaines ; des réserves de
change estimées par la banque d’Algérie à 63 milliards de dollars à
fin février 2023, une recette de Sonatrach de 60 milliards de dollars fin 2022
et étant prévu entre 50/55 milliards de dollars fin 2023,
avec une baisse de l’encours de la dette extérieure inférieure
à 3 milliards de dollars, donc n « tant pas pénalisé par
le relèvement des taux d’intérêts des banques centrales afin de lutter contre
l’inflation, contrairement à de nombreux pays endettés., La France
et l’Algérie ont convenu de renforcer leur coopération en priorité sur les
secteurs d’avenir : le numérique, les métaux rares, la santé,
l’agriculture et le tourisme. Dans le domaine de l’énergie, l’Algérie est par
ailleurs, un acteur stratégique pour l’Europe dans son approvisionnement
énergétique (12 % en 2022) , et peut doubler ses capacités à l’horizon
2025-2027 en sous réserve d’une plus grande efficacité énergétique,
devant solutionner l’épineux dossier des subventions, du développement des
énergies renouvelables pour satisfaire la consommation intérieure, en
2022, presque l’équivalent des exportations et d’un investissement
massif des compagnies internationales qu’elle encourage à travers la
nouvelle loi des hydrocarbures . Ainsi, il a été convenu
de coopérer sur la transition énergétique – notamment au travers d’une
coopération dans les domaines du gaz et de l’hydrogène – et de lancer un
programme de recherche d’innovation technologique sur la récupération et le
traitement du gaz de torchage.. N’oublions pas le nombre de
résidents d’origine algérienne dans le monde, recélant
d’importantes potentialités intellectuelles et économiques. La promotion des
relations entre l’Algérie et sa communauté émigrée doit mobiliser à divers
stades d’intervention l’initiative de l’ensemble des parties concernées, à
savoir le gouvernement, les missions diplomatiques, les universités, les
entrepreneurs et la société civile. (Voir Pr A. Mebtoul :
« Les axes de la coopération Europe/Maghreb », IFRI, décembre 2011,
et la conférence en juin 2021, à l’invitation de la
commission européenne, à Alger).
4.-Les relations ente
l’Algérie et la France concerne les tensions en Afrique , enjeu du XXIème
siècle, expliquant les rivalités des grandes puissances, qui est une priorité
stratégique pour l’Algérie.
De par sa position géographique, l’Algérie
peut servir de pont en direction de l’Afrique tant pour l’Europe que dans
le cadre de la route de la Soie initiée par la Chine. Cela
explique sa stratégie d’investissement dans les infrastructures en direction de
ce continent notamment le projet du port de Cherchell et la réalisation de la
route transsaharienne, où j’ai eu l’honneur d’ être l’officier
d’administration au sein de l’ANP entre 1972/1973 pour la réalisation de l’axe
Ghardaïa-El Goléa, In salah. La population de l’Afrique est passée de
100 millions d’habitants en 1900, la population de l’Afrique est passée à
environ 275 millions dans les années 1950-1960, puis à 640 millions en 1990 et
à 1,4 milliard en 2022 soit 18 % de la population mondiale avec un quart à
l’horizon 2035/2040. Le PIB de l’Afrique devrait passer de 2 980,11
milliards de dollars en 2022 à 4 288,08 milliards de dollars en 2027,
soit une hausse de 43,89% Même si les exportations africaines
de biens et services ont enregistré une croissance particulièrement rapide au
cours des dix dernières années, elles représentent à peine 3 %
du commerce mondial en 2022, loin de ses importantes
potentialités. L’Afrique est caractérisée par la faiblesse de son
intégration qui est de l’ordre de 11/12 % alors que le flux des échanges entre
pays européens est de plus de 60 %. Il est utopique pour l’instant de
parler d’intégration de tout le continent Afrique, mais de sous intégrations
régionales, l’important est de dynamiser des effets économiques de
la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA) afin de stimuler
la croissance, de réduire la pauvreté et d’élargir l’inclusion économique dans
les pays concernés.
En conclusion.
La nouvelle configuration internationale annonce un
profond bouleversement géostratégique, avec les impacts du conflit en Ukraine,
le rétablissement des relations diplomatiques entre l’Iran et l’Arabie
Saoudite, l’élargissement des BRICS qui est composé du Brésil, la Russie,
l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud s’orientant vers un monde multipolaire
dont l’objectif est le respect souverain des décisions de chaque Etat membre ..
Lors de la prochaine réunion en Afrique du Sud, d’autres pays ont proposé soit
leur adhésion, soit comme membre observateur dont l’Algérie, dont el but à
travers cette adhésion est de diversifier son économie et ses partenaires,
le PIB des BRICS pouvant passer de 25% en 2022 à 30% du PIB
mondial entre 2025/2030 avec 50% de la population mondiale . Le regain
d’intérêt des USA et de l’Europe en direction de l’Afrique rentre dans le
cadre de des rapports de force au sein de la nouvelle carte mondiale,
les USA, ou l’Europe pour moins d’un milliard d’habitants accaparant sur
le PIB mondial de 100.000 milliards de dollars en 2022 environ 40%. Dans
le cadre d’une stratégie d’adaptation, l’Algérie dont ses exportations actuelles,
composées à plus de 90% d’hydrocarbures sont orientées essentiellement
vers l’Europe, entend défendre, comme tout pays, ses propres intérêts car
dans les relations internationales n’existent pas de
fraternité ni de sentiments, mais que des intérêts, les opérateurs – qu’ils
soient arabes, chinois, russes, français ou américains, leurs objectifs étant
de réaliser le profit maximum, appartenant à l’Etat régulateur et aux
institutions internationales de concilier l’efficacité économique et la
nécessaire cohésion sociale .